Sous la pression des associations de consommateurs et de Bercy, les banques se sont engagées à plafonner les frais d’incidents de paiements pour certains clients jugés fragiles. La mise en œuvre de ces promesses, toutefois, se fera a minima : chaque enseigne pourra notamment déterminer son propre plafond.
Ça n’a pas traîné ! Lundi soir 3 septembre, Bruno Le Maire présentait à la presse les engagements obtenus des banques pour limiter la cascade de frais qui s’abat sur leurs clients à chaque incident de paiement. Mardi 4 septembre, la Fédération bancaire française (FBF), syndicat représentatif des établissements, publiait sur le sujet un « bon usage professionnel », doctrine officielle, mais pas forcément contraignante, sur les pratiques à mettre en place, sur le terrain, pour remplir ces engagements.
Parmi eux, le plus attendu, car évoqué depuis plusieurs semaines déjà par le gouvernement et la Banque de France, est la mise en place d’un plafonnement de l'ensemble des frais d’incidents pour les clients détectés comme fragiles par les banques, et qui auraient accepté de souscrire, à ce titre, à un forfait de services spécifique à 3 euros, baptisé offre spécifique clients fragiles (OCF). Dans sa communication lundi, Bruno Le Maire a indiqué la voie à suivre : le ministre de l’Economie « a demandé que ces frais ne représentent pas plus de 20 euros par mois et 200 euros par an ».
Un plafond « fixé librement de façon unilatérale par chaque banque »
Il n’est toutefois pas certain d’être entendu. Plutôt que de passer par une loi pour fixer ce plafond - comme cela avait été fait par exemple pour les commissions d’intervention - le ministre de l’Economie a choisi de s’en remettre à la bonne volonté des directions bancaires. Et à aucun moment celles-ci ne s’engagent, dans le document publié mardi, sur un montant. « Le niveau global de ce plafonnement est fixé librement de façon unilatérale par chaque banque », peut-on lire dans le bon usage, « en fonction de ses propres coûts et de sa politique d’inclusion bancaire envers ces publics qui souscrivent à l’OCF. »
En clair, chaque banque fera ce qu’elle voudra. Choisiront-elles de s’aligner sur la recommandation gouvernementale ? Opteront-elles effectivement pour un double plafonnement, mensuel et annuel ? Possible mais pas certain, en l’absence de contraintes. Seule promesse : le montant du plafond sera indiqué en clair dans les plaquettes tarifaires.
Les 9 lignes de frais d’incidents incluses dans le plafonnement
- Les commissions d’intervention ;
- Les frais de lettre d'information préalable pour chèque sans provision ;
- Les frais de lettre d'information pour compte débiteur non autorisé ;
- Le forfait de frais par chèque rejeté pour défaut de provision ;
- Les frais de rejet de prélèvement pour défaut de provision ;
- Les frais de non-exécution de virement permanent pour défaut de provision ;
- Les frais suite à notification signalée par la Banque de France d'une interdiction d'émettre des chèques ;
- Les frais pour déclaration à la Banque de France d'une décision de retrait de carte bancaire ;
- Les frais d'opposition (blocage) de la carte par la banque.
Les banques s’engagent à mettre en place un plafond au plus tôt en janvier 2019 et au plus tard fin juin 2019.
Les personnes éligibles recontactées
Autre pan des promesses bancaires : l’élargissement de l’accès à l’offre spécifique clients fragiles (OCF). Car le plafond des frais d’incidents, il faut le rappeler, ne concernera que les bénéficiaires de cette offre, au grand dam des associations qui souhaitaient un plafonnement global pour tous. Soit 375 000 personnes environ actuellement et 500 000 bientôt, espère Bruno Le Maire, qui a demandé aux banques d’augmenter de 30% le nombre de bénéficiaires d’ici la fin 2019.
Malgré la faible pénétration de l’OCF - 10% environ des personnes éligibles en bénéficient actuellement - les banques s’affichent plutôt satisfaites du travail accompli en la matière. Dans leur bon usage professionnel, elles s’engagent néanmoins à « contacter individuellement chaque client éligible en utilisant les moyens d’information et de communication qu’elles jugent les plus appropriés ». Ce contact pourra donc aussi bien être un rendez-vous avec un conseiller spécialisé qu’un simple SMS. Du choix de l’un plutôt que l’autre dépendra évidemment une bonne part du succès de l’entreprise, et la réelle efficacité des mesures affichées.