Un produit opaque, vendu sans conseil et souvent trop cher, qui profite surtout aux banques et aux assureurs qui le distribuent : c'était, en substance, la conclusion de notre enquête sur l'assurance emprunteur des crédits à la consommation. Sollicitée, l'ACPR, gendarme du secteur financier, confirme que ce marché à 2,7 milliards d'euros par an est sous surveillance.

D'un côté, un produit facultatif, mais proposé avec insistance, au point d'équiper plus de la moitié des consommateurs concernés ; de l'autre, un marché à 2,77 milliards d'euros par an, dont les acteurs affichent une marge brute dépassant les 70%... Dans une série d'articles publiés la semaine dernière, MoneyVox a tenté de dévoiler les dessous, assez sombres, d'un marché méconnu, celui de l'assurance emprunteur des crédits à la consommation.

Crédit conso : le business juteux de l'assurance emprunteur qui coûte très cher aux consommateurs

Nous avons contacté l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pour lui demander de réagir aux résultats de notre enquête. Dans un courriel reçu aujourd'hui, mardi 21 novembre, le régulateur du secteur banque-assurances confirme l'essentiel de nos conclusions.

Des pratiques commerciales « pas toujours satisfaisantes »

A l'appui de notre enquête, nous avons effectué une série de demandes de crédit conso en ligne, avec des profils et pour des projets variés, sur les sites web des principaux établissements de crédit spécialisés. Un test grandeur nature qui a permis de mettre en évidence, chez certains acteurs en particulier, des pratiques commerciales discutables : caractère facultatif de l'assurance affiché très discrètement, option précochée, messages anxiogènes en cas de refus, absence de conseil personnalisé...

Crédit conso : comment les banques vous mettent la pression pour prendre l'assurance emprunteur

« Les contrôles menés (...) au cours des dernières années confirment que la distribution d'assurance emprunteur en lien avec les crédits à la consommation n'est pas toujours satisfaisante, faute notamment de ne pas suffisamment prendre en considération les intérêts des clients », confirme l'ACPR, qui a dû intervenir : « Plusieurs établissements ont par exemple dû mettre en œuvre des mesures de remédiation afin que le caractère facultatif de l'assurance proposée soit plus explicite (...) ou que le conseil soit mieux formalisé et davantage personnalisé. »

« Améliorer l'intérêt du produit pour le client »

Parmi les sources utilisées pour notre enquête figure un rapport, publié en 2022, par l'EIOPA (1), le « gendarme » européen de l'assurance, consacré au marché européen de l'assurance emprunteur. Un rapport qui émet un certain nombre de critiques vis-à-vis des conditions de distribution de ces produits, notamment pour le crédit conso : opacité des contrats, risques de conflit d'intérêt au détriment du consommateur et, surtout, déséquilibre entre le coût du produit et son intérêt pour l'emprunteur.

Cette dernière critique est reprise par l'ACPR : « L'Autorité partage les doutes d'EIOPA quant à l'utilité du produit en toutes circonstances, notamment lorsque l'emprunteur est déjà protégé contre les risques d'incapacité, invalidité ou décès ou, plus généralement, que le crédit est d'un faible montant sur une courte durée. »

Exclusions, délais de carence... Avez-vous intérêt à prendre l'assurance pour un crédit conso ?

« Dans le prolongement de l'avertissement émis par l'EIOPA, [l'ACPR] a initié plusieurs actions visant, d'une part, à objectiver la situation sur le marché français et d'autre part, à examiner différentes pistes pour améliorer l'intérêt du produit pour le client (« value for money ») », poursuit le régulateur.

Parmi ces pistes figure, selon nos informations, le relèvement du ratio dit « sinistre à prime » de ces contrats d'assurance, c'est-à-dire du rapport entre les primes brutes payées par les assurés et les sommes qui leur sont reversées pour couvrir leurs sinistres. En France en 2020, ce ratio était, selon l'EIOPA, de l'ordre de 20%. Le plus faible, et de loin, de tous les types d'assurance.

(1) European Insurance and Occupational Pensions Authority, « Credit Protection Insurance (cpi) sold via banks », 2022.